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ou les fêtes des saints Éloi, Barbe et Nicolas

Les trois saints particulièrement fêtés au début décembre sont loin d’être les plus représentés dans la collégiale Sainte-Waudru.

Ainsi, saint Éloi est représenté, vêtu en évêque, mitré, portant une crosse et un marteau de la main droite, dans une statue du XVIIIe et dans un groupe « processionnel » (XVIe/XVIIIe) en bois, dépôt au Trésor de la Fabrique de Sainte-Elisabeth. On voit dans ce groupe saint Éloi ferrant « miraculeusement » son cheval enfermé dans un travail[i]. Éloi figure aussi sur un vitrail (chapelle 7) du XIXe (réalisé par le verrier Casier) où il est représenté en évêque. Le trésor possède également un « collier de confrérie » dont la plaquette en argent (probablement fin XVIIIe ou début XIXe) représente saint Éloi.

Sans oublier la relique du saint intégrée dans un reliquaire de la fin du XIIIe offert à la collégiale par le chanoine Pierre Cramette à la fin du XIVe (1376 ou 1396) et celle intégrée, avec des reliques des saints Etienne et Quirin, dans un reliquaire en cuivre (style du XIVe) dont l’inscription « cest. aux. poures. ceurs. du. beghinage. » (c’est aux pauvres sœurs du béguinage) indique la propriété antérieure à la Révolution française. Notons encore que la bannière de la confrérie de Saint-Éloi (velours vert bordé de galons dorés et toile peinte[ii] – XIXe) existe toujours mais n’est plus utilisée lors de la procession.

Il faut encore préciser qu’une confrérie de Saint-Éloi a été érigée en la collégiale Sainte-Waudru en 1857. Le premier décembre, la confrérie, et ce jusqu’au début du XXe au moins, faisait célébrer à 11h00 une « Grand-Messe solennelle » et à 18h00 un « salut solennel avec procession » ; le lendemain, 2 décembre à 7h30, était prévue une « messe pour les défunts de la Confrérie ». C’est le garde de la collégiale qui tenait note des inscriptions dans le registre de la confrérie.

Sainte Barbe, identifiable aisément grâce à la tour devenue son attribut caractéristique, est représentée sur un monument funéraire du XVe (chapelle 3), sur une lettrine enluminée du livre d’heures de 1490/1510, sur une croix en argent de 1589, dépôt au Trésor de la Fabrique de Notre-Dame de Messines. En 1857, Devillers signale une statue de Sainte-Barbe dans la chapelle de Saint-Hilaire (statue disparue depuis)[iii].

Quant à saint Nicolas, il est représenté, mitré, portant une crosse et accompagné du saloir de la légende, sur un monument funéraire du XVe, sur une lettrine enluminée du livre d’heures de 1490/1510 et sur un tableau du XVIIIe (chapelle 26). Il est aussi brodé sur une dalmatique de la fin du XIXe et peint sur l’envers d’un des volets du retable (début XXe) dédié à saint Jean-Baptiste de la Salle.

Saint Éloi, notamment en tant que patron des orfèvres, disposait, au moins dès 1767 et peut-être déjà au XVIe[iv], dans la collégiale d’une chapelle « mise à disposition » de la confrérie des orfèvres par le chapitre de Sainte-Waudru. La chapelle (n° 7) est toujours en ce début du XXIe dédiée à saint Éloi.

Lors de l’enlèvement du tableau d’autel de la chapelle Saint-Éloi en vue de sa restauration (une Sainte-Famille d’après Raphaël), une « fresque » a été découverte sur le mur de la chapelle. Cette peinture n’est pas un chef-d’œuvre mais elle témoigne de ce qui a été réalisé, sans doute dans l’urgence, au début du XIXe quand la collégiale fut rendue au culte et que la chapelle fut « reprise » par la confrérie de Saint-Éloi[v].

Dans l’ancien Régime, la chapelle n°8 (celle où se trouve le petit orgue de chœur) était dédiée à sainte Barbe et ce au moins depuis la fin du XVe. Lorsque Devillers publie, en 1857, son « Mémoire historique et descriptif sur l’église de Sainte-Waudru à Mons », aucune des 29 chapelles de la collégiale n’est attribuée à la sainte Patronne des mineurs. C’est donc dans la première moitié du XIXe (à moins que ce ne soit à l’extrême fin du XVIIIe) que sainte Barbe s’est vue privée de chapelle en la collégiale.

Quant à saint Nicolas, il semble presque normal qu’il ne dispose, ni durant l’ancien Régime ni aujourd’hui, d’une chapelle dans la collégiale en raison des deux églises paroissiales qui lui sont dédiées à Mons (Saint-Nicolas-en-Havré et Saint-Nicolas-en-Bertaimont – devenue officiellement Notre-Dame de Messines en 1992).

Saint Éloi, sainte Barbe et saint Nicolas sont évidemment évoqués lors de la procession du Car d’Or. Notons que sainte Barbe a toutefois été « privée de procession » durant près d’un demi-siècle,

Saint Éloi est l’objet de l’un des trois groupes issus de la paroisse Sainte-Elisabeth. Une statue (bois doré) du XVIIIe le représente avec son marteau et son enclume d’orfèvre. La statue est présentée toute l’année dans la chapelle qui lui est dédiée en Sainte-Elisabeth (quatrième chapelle sur la droite en entrant dans l’église) et dont le tableau d’autel est une peinture[vi] du XVIe consacrée à saint Éloi. C’est sur le brancard de la statue du XVIIIe que devrait/pourrait prendre place le « groupe processionnel » exposé au Trésor de la collégiale.

Sainte Barbe est revenue en procession en 1995 (après y avoir été présente du temps du chapitre et au moins jusqu’en 1949). La statue « processionnée » vient de Ciply, dont l’église paroissiale est dédiée à sainte Waudru. Barbe, vêtue d’une robe rouge, d’une tunique argentée et d’un manteau/cape à la dominante bleue, est accompagnée de la tour de sa légende (notons cependant que la tour ici ressemble plus à un clocher d’église) et tient de la main gauche la palme du martyre.

Le groupe dédié à saint Nicolas est probablement le plus petit – mais pas le moins « riche » – de la procession. En effet, le « groupe » est constitué d’une seule personne portant la masse de la paroisse de la rue d’Havré.  Cette masse, exceptionnelle orfèvrerie de 1772, représente saint Nicolas (mitré, portant une chape aux bords ornés d’orfrois et tenant de la main droite une crosse) accompagné des trois enfants de la légende. Cette masse est l’œuvre de l’orfèvre Beghin et reste, malheureusement, cachée aux regards la plupart du temps.

Éloi, Barbe et Nicolas ne sont pas les plus représentés dans le patrimoine artistique de la collégiale. Ils demeurent cependant, de nos jours, des saints particulièrement fêtés dans notre région durant la première semaine de décembre.

Et pour terminer par saint Nicolas, n’oublions pas qu’il fut un temps, pas si lointain, où son royaume s’installait dans les étages des Galeries Anspach (à deux pas de la collégiale) et que les enfants (sages ou non) qui lui rendraient visite recevaient un bonbon et un « cliquet » rouge ou jaune sur lequel était représenté le « Grand saint »  … et dont le bruit pouvait « parfois » être agaçant !

Benoît Van Caenegem

Conservateur de la collégiale Sainte-Waudru

et de son Trésor

[i] Structure permettant d’immobiliser le cheval afin de le ferrer en toute sécurité.

[ii] La peinture représente saint Eloi vêtu en évêque. Il porte une soutane noire, un surplis blanc à dentelles, une chape dorée et une mitre dorée. De la main droite, il tient une crosse et de la gauche un marteau couronné. Il est intégré dans un paysage urbain qui se découpe derrière lui.

[iii] DEVILLERS Léopold, Mémoire historique et descriptif sur l’église de Sainte-Waudru à Mons, Mons, 1857, p. 65.

[iv] Voir en ce qui concerne la chapelle Saint-Eloi : DEVILLERS Léopold, Mémoire historique …, p. 66.

[v] Sur un fond bleuté, la « fresque » représente une gloire aux rayons dorés, entourée d’un halo nuageux blanc et surmontée de trois têtes d’angelots chevelus, joufflus et ailés. La « fresque » a été découverte le 24 septembre 2016 lors du départ en restauration de la peinture d’autel. Merci à Rodolphe Zinga pour les photos et la date de mise à jour de la peinture murale.

[vi] Lors de la restauration de la peinture, des traces de suie ont été retirées. Il se pourrait que ces traces témoignent que la peinture se trouvait, depuis le XVIe, dans l’église qui a été détruite lors de l’incendie de 1714. La peinture se trouve dans la chapelle Saint-Eloi qui occupe le même emplacement de nos jours que dans l’église de 1588 détruite en 1714.