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à Mons !

Anne-Charlotte princesse de Lorraine (Lunéville, 1714 – Mons, 1773) avait été désignée, par sa belle-sœur l’impératrice Marie-Thérèse, abbesse du chapitre de Sainte-Waudru le 13 juillet 1754 dans des lettres signées à Vienne. Lors de sa désignation à Mons, elle était déjà investie des fonctions d’abbesse de Remiremont. En 1756 et 1757, elle sera nommée respectivement coadjutrice des monastères de Thorn et d’Essen.

Elle avait fait son entrée à Mons le 17 novembre 1754 et avait alors assisté à un Te Deum en la collégiale. Le lendemain, 18 novembre, Anne-Charlotte de Lorraine prenait officiellement possession de sa fonction d’abbesse du chapitre de Sainte-Waudru.

Elle restera abbesse de Sainte-Waudru jusqu’à son décès en 1773. Elle occupera, durant son séjour montois, un hôtel situé rue du Gouvernement tout en s’absentant régulièrement pour de nombreux voyages.

Le « Calendrier du Hainaut pour l’an de grâce M.D.C.C.LXXIII. contenant l’état et le personnel de la Cour de Son Altesse Royale Madame la Princesse ANNE-CHARLOTTE DE LORRAINE », nous donne quelques précisions sur les personnes qui entouraient celle qui était l’abbesse du chapitre de Sainte-Waudru en représentation de « Sa Majesté Impériale et Royale Apostolique ».

L’abbesse avait ainsi à son service :

  • une Grande-Maîtresse ;
  • une Dame de Cour ;
  • un Grand-Maître ;
  • des officiers ecclésiastiques (un « premier aumônier et conseiller intime », un confesseur, cinq aumôniers ordinaires, un sacristain) ;
  • un Cabinet composé de deux conseillers – secrétaires intimes, de deux trésoriers en survivance, d’un trésorier en Lorraine ;
  • deux bibliothécaires (dont Matthieu Wilmet, imprimeur à Mons) ;
  • un horloger ;
  • des Officiers de santé (un Premier Médecin, un conseiller médecin ordinaire, quatre médecins consultants parmi lesquels deux chirurgiens, un apothicaire) ;
  • un personnel de chambre composé de huit femmes dont une coiffeuse, de trois filles de Garde-robe, d’une « sous-fille de garde robe chargée de l’entretien des Dentelles & Points », quatre hommes de chambre dont un tapissier, deux garçons de chambre, trois huissiers de chambre ;
  • un personnel de l’hôtel composé d’un Conseiller intime – intendant-général de la Maison de Son Altesse Royale, d’un secrétaire de l’hôtel, pourvoyeur & chef de l’Office de Dépense, d’un commis au Bureau de l’hôtel, d’un chef de lingerie & couvreur de table, d’un chef de cuisine, de cinq aides de cuisine (garçon, relaveur et balayeur, chef-rôtisseur, tournebroche), d’un chef-pâtissier, d’une chef de fruiterie & garde-vaisselle, d’un aide-d’office, d’un aide de vaisselle, d’un relaveur de vaisselle, d’un « frotteur et garçon d’appartement », de deux porteurs de bois et balayeurs, d’un chef de la cave, d’un couvreur de la table des Femmes de Son Altesse Royale, d’un jardinier ;
  • un personnel de livrée : un suisse, six valets-de-pied, deux porteurs de chaises, deux coureurs ;
  • un personnel d’écurie : un sous-écuyer des équipages, des cochers, des postillons, des palefreniers et des garçons d’attelages.

Cette liste donnée dans le calendrier du Hainaut de 1773 n’est probablement pas exhaustive.

Si des membres du personnel sont évidemment montois, d’autres en revanche avaient accompagné la Princesse de Lorraine au départ des Vosges et s’étaient finalement installés à Mons.  Certains sont même restés dans la capitale hennuyère bien après le décès d’Anne-Charlotte de Lorraine le 7 novembre 1773.

Ainsi, dans le registre de funérailles de la collégiale Sainte-Waudru, en juin 1795 (soit près de 22 ans après la mort de l’abbesse), est acté le décès, le 11, de celui qui fut le premier médecin d’Anne Charlotte de Lorraine, abbesse du chapitre de Sainte-Waudru de 1754 à 1773 :

« Le 12 juin 1795 enterré François Joseph Latrayes, en son vivant premier médecin de feue la princesse Anne Charlotte de Lorraine décédé la veille vers cinq heures du matin, âgé d’environ quatre-vingts ans, étant né à Vitel (sic) en Lorraine le 2 juillet 1715, fils de Claude François Latrayes et de Barbe Vilpert, veuf de Marie Claire Gauchy, décédée le 17 mars 1795 ; Paroissien de Ste Waudru.

(sé) PLJ Croquet doyen de St Germain curé de Ste Waudru »[i]

L’épouse de ce médecin était décédée à Mons peu de temps avant lui, en mars 1795 :

« Le 19 mars 1795 enterrée la citoyenne Marie Claire Gauchy épouse du docteur en médecine Latraye née à Mirecourt en Lorraine âgée de 82 ans 4 mois décédée le 17 précédent, paroissienne de Ste Waudru.

(sé) PLJ Croquet doyen de St Germain curé de Ste Waudru ».[ii]

François Latrayes et Marie Claire Gauchy (orthographié Gauché dans l’acte de mariage) s’étaient mariés le 26 mai 1739 à Mirecourt dans les Vosges. Dans l’acte de mariage, il est précisé que François Latrayes est « docteur en l’université de médecine de Montpellier »[iii].

François Joseph Latrayes avait été baptisé le jour de sa naissance en la paroisse Saint-Rémy de Vittel (Vosges – France) :

« Le second du mois de juillet de l’an mil sept cent et quinze est né et a été baptisé François Joseph fils de Claude François Latraye et de Barbe Vilpert son épouse, le parrain a été le Sr André Vilpert et la marraine Marguerite Gaillard son épouse pour et au nom de François Joseph Chaudot et de Thérèse Vilpert, lequel Vipert a signé et non la D. Gaillard pour ne savoir le faire.

(sé) André Vilpert           Gaillard Ch. »[iv]

Quant à la Princesse de Lorraine qui était venue à Mons avec toute sa cour, son décès est acté dans le registre des funérailles de la collégiale :

« Novembre 1773

Le 7 vers le quart avant dix heures du soir est morte en cette ville Son A. R. Madame Anne Charlotte Duchesse de Lorraine.

Emmenée le 8 décembre suivant pour être inhumée aux P.P. Cordeliers de Nancy lieu de la sépulture de ses ancêtres.

Xbre suivant

Le 13 et 14 fut fait les vigiles et service dans cette église de la part du chapitre, étant représentée Sa Majesté l’Impératrice Reine Apostolique, le tout s’est pratiqué comme aux Empereurs »[v].

Si Anne-Charlotte de Lorraine fut la seule « vraie » abbesse du chapitre de Sainte-Waudru durant 21 années, la collégiale ne conserve presque rien d’elle

Seul Gonzales Decamps signale un tableau « L’Exaltation de Saint-François de Paule, par Théodore Van Thulden, élève de Rubens, toile d’un pinceau hardi et d’un brillant coloris, donné à l’église par la princesse Anne-Charlotte de Lorraine, abbesse séculière du chapitre »[vi].

Si l’affirmation de Gonzales Decamps est vraie, nous avons alors la chance de posséder encore un somptueux cadeau fait par l’abbesse à sa collégiale.

Benoît Van Caenegem

Conservateur de la collégiale Sainte-Waudru

et de son Trésor

[i] Archives de l’Etat en ligne, Registres paroissiaux. Province du Hainaut. Arrondissements de Charleroi et Mons. Mons, paroisse Sainte Waudru. Registres Paroissiaux. Actes de décès / sépultures du 26/09/1794 au 18/06/1796, p. 7 (consulté le 11.07.2023).

[ii] Idem, p. 5.

[iii] Archives départementales des Vosges en ligne, commune Mirecourt (Vosges, France), Edpt309/GG_39-48310, registre des mariages du 6 janvier 1739 au 20 décembre 1739, p. 15 et 16 (consulté le 11.07.2023).

[iv] Archives départementales des Vosges en ligne, commune de Vittel, paroisse Saint-Rémy, Edpt528-82498, registre des baptêmes, mariages et décès du 13 septembre 1714 au 7 mai 1718, p. 11 (consulté le 11.07.2023).

[v] Registres paroissiaux. Province du Hainaut. Arrondissements de Charleroi et Mons. Mons, paroisse Sainte Waudru. Registres Paroissiaux. Actes de décès / sépultures du 01 janvier 1770 au 31 décembre 1784, p. 20 (consulté le 11.07.2023).

[vi] DECAMPS G., Mons Guide du Touriste, Mons 1894, p. 116.